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C’est avec une perception aiguë, méticuleuse, que Tomas Tranströmer parcourt la zone limitrophe des terres habitées, comme si cette étendue en marge s’apparentait à un réservoir de visions simples suscitées au bord du réel. Les livres qu’il publie depuis 1954 suggèrent une quête obstinée, accomplie sans emphase et pas à pas, qui affronte l’opacité des signes, l’irréductibilité des choses, l’ombre des actes. Une tension singulière se développe qui souligne le doute, l’ironie, mais aussi l’ampleur du dessein. En fait, si Tranströmer se veut en route, sa recherche progresse humblement, en conscience et sans brûler les étapes de l’énigme. Sa tâche, c’est d’inventer une langue où transcrire toutes les bribes du présent.

Qu’il évoque des terres familières, des horizons lointains ou des séquences historiques, Tranströmer se livre à des travaux d’approche qui suggèrent plus la déroute que le but. Souvent inscrits entre rêve suspendu et terreur redoublée, ses textes sont peuplés d’anonymes fugaces, renaissants, pareils aux figures sans visage et sans âge d’une sombre allégorie

Baltiques – Oeuvres complètes 1954-2004 de Tomas Tranströmer , Traduction Jacques Outin , Kjell Espmark et Renaud Ego, Editions Gallimard, 30/09/2004 – 377 pages